Le 20 juin 2011

Le juge des référés et la mise à disposition des salles de sports municipales.

Le juge des référés et la mise à disposition des salles de sports municipales.
Le dernier recensement des équipements sportif en France a montré que les collectivités territoriales et plus particulièrement les communes étaient le premier propriétaire des équipements sportifs en France du fait d’une origine fort ancienne.

A ce titre, le fonctionnement des associations sportives locales doit beaucoup à la mise à disposition gratuite des différentes installations sportives municipales. On peut dater avec J.P. Callède l’apparition de véritables politiques sportives locales dans les années qui ont suivi les élections municipales de 1925 notamment en termes de construction d’équipements destinés à assurer un certain prestige local. Il est d’ailleurs acquis depuis l’arrêt Ville de Toulouse que les installations sportives appartiennent au domaine public des communes.

Si pour le sport professionnel, il est impératif que les communes fassent payer une redevance d’occupation à la hauteur des prestations offertes, ce n’est pas le cas pour les associations sportives qui exercent leurs activités dans un cadre non lucratif. Comme le rappelait dans une instruction, le ministère de l’intérieur, les conventions passées avec les sociétés sportives professionnelles doivent s’analyser comme les autres conventions d’occupation du domaine public c'est-à-dire qu’elles doivent donner lieu au versement d’une redevance. Le juge n’hésite d’ailleurs à s’assurer que le montant de la redevance est suffisant.

De leur côté, les associations sportives locales peuvent donc bénéficier du droit d’occuper gratuitement les installations sportives municipales au titre de l’intérêt communal. Le code général de la propriété des personnes publiques dans son article L. 2125-1 dispose que toute occupation ou utilisation du domaine public donne lieu au paiement d’une redevance. Toutefois, cette règle souffre d’une exception car l’article L. 2125-1 comprend aussi l’alinéa suivant : « l’autorisation d’occupation ou d’utilisation du domaine public peut également être délivrée gratuitement lorsque cette occupation ou utilisation ne présente pas un objet commercial pour le bénéficiaire de l’autorisation. L’organe délibérant de la collectivité concernée détermine les conditions dans lesquelles il est fait application du présent alinéa »
Le juge apprécie ainsi souverainement l’intérêt local en question. Dans une affaire concernant l’occupation à titre gratuit du domaine public communal pour une manifestation sportive ponctuelle, la Cour administrative d’appel de Marseille a pu estimer que la manifestation en question ne présentait pas d’intérêt communal et n’était pas organisée par une association régie par la loi du 1er juillet 1901, ce qui ne justifiait pas une occupation à titre gratuit.


Le contentieux de la mise à disposition des ces équipements n’est pas très développé mais ce qui constitue une nouveauté c’est que les clubs sportifs n’hésitent plus à saisir le juge administratif afin de faire valoir leur droit d’occuper telle ou telle installation en raison de leur antériorité ainsi que de leur nombre de licenciés. Ainsi, le principe de l’égal accès aux installations sportives municipales a été reconnu. D’une manière générale, le juge n’hésite plus à aller vérifier le respect des engagements des communes à l’égard des clubs. Ainsi, le refus du versement d’une subvention déjà accordé sans motif valable entraine-t-il la responsabilité de la commune. La mise à disposition, généralement gratuite des installations municipales (il est rare que les équipements sportifs soient affectées à une seule association) s’effectue la plupart du temps sous la forme de créneaux horaires.

Pour les associations sportives qui ne visent que la compétition amateur, le fait d’être privées des installations municipales peut s’analyser comme une condamnation à mort dans la mesure où sans lieu pour fonctionner, l’objet de l’association au sens de la loi du 1er juillet 1901 devient impossible à poursuivre ou pour le moins très difficilement.

Devant, des décisions arbitraires ou qui apparaissaient comme telles, des clubs n’ont pas hésité à déposer des recours au fond doublé d’un recours en référé-suspension afin de préserver leurs droits pour la saison sportive en cours. Ces affaires nous ont conduit à analyser les rares décisions existantes sur la question.

Quatre décisions seront analysées ici dont trois ont pour origine le même club «l’Olympique Cabriès-Calas » (OCC) dans la périphérie de Marseille et l’association « Blagnac Constellation Gym » (BCG) dans la périphérie de Toulouse, ce qui montre que les associations sportives n’hésitent plus à aller faire valoir leur droit, au moins dans le Sud de la France !

Comme la saison sportive est brève et qu’elle débute dés les premiers jours du mois de septembre, une simple requête en annulation devant le juge administratif ne permettrait pas de sauvegarder les intérêts du club c'est-à-dire la faculté de pouvoir s’entraîner dans les installations sportives municipales afin de préparer la saison sportive.

La création du référé suspension de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative avec la loi du 30 juin 2000 a permis d’ouvrir une nouvelle voie de contestation des décisions municipales dont la rapidité convient tout à fait aux impératifs des compétitions sportives. Au passage, il faut souligner qu’en l’espèce, le juge administratif a su relever le défi de la rapidité sans que l’on en passe par une voie dérogatoire du droit commun parce qu’il s’agit de sport comme la mode semble devoir se développer à l’heure actuelle, notamment pour la construction de nouveaux stades destinés aux clubs professionnels.

En raison de l’importance des enjeux, à savoir la survie de l’association sportive, au moins pour la partie compétitive de son activité, la voie du référé suspension a paru pouvoir être utilisée avec succès. Deux clubs ont utilisé avec succès cette procédure afin de pouvoir continuer à bénéficier de créneaux horaires dans les enceintes sportives municipales. L’une des procédures a fait l’objet d’un recours en cassation devant le Conseil d’Etat qui a finalement été rejeté au niveau du tri.

Les quatre affaires qui donné lieu à une ordonnance de référé ont montré que la juge allait rechercher les éléments qui lui permettait d’apprécier le fonctionnement des clubs et les effets des décisions municipales contestées.

Le référé suspension présente la particularité de remplacer partiellement l’ancien sursis à exécution à la suite de la loi n°2000-597 du 30 juin 2000. L’idée sous jacente à la mise en place de cette procédure est clairement de favoriser par le juge administratif, le prononcé de mesures provisoires de nature à faire obstacle à l’exécution des décisions administratives litigieuses. Un des intérêts majeurs de cette nouvelle procédure résulte de la lecture extensive qu’en a faite le Conseil d’Etat en autorisant la suspension d’une mesure de rejet dans certains cas, avant d’étendre la solution après l’entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, alors que sa jurisprudence antérieur s’y opposait. Avec la jurisprudence « Roche », le Conseil d’Etat précise les conditions d’application du nouvel article L. 521-1 du Code de justice administrative. Seules les décisions administratives exécutoires (explicites ou implicites) peuvent faire l’objet d’un recours. Ce qui est le cas de l’affectation des créneaux horaires d’occupation des installations municipales généralement notifié par un courrier. La condition liée à l’existence d’une décision exécutoire se double d’une autre, à savoir que la décision ne doit pas avoir été intégralement exécutée, auquel cas, le juge rejettera la demande.

Enfin, le recours en référé doit être doublé d’un recours au fond. A ce niveau, il n’est pas inutile de rappeler que de manière théorique c’est le recours au fond qui précède le référé. Ce qui en d’autres termes et afin d’éviter tout rejet regrettable, signifie que le requérant doit d’abord déposer une requête au fond et viser cette requête dans la demande de référé à peine de nullité. Il n’est pas possible de faire un seul recours rassemblant les deux requêtes. Le Conseil d’Etat vérifie la réalité des deux requêtes et considère qu’il n’est pas possible à une juridiction de régulariser la situation en procédant à l’inscription au rôle sous deux numéros différents alors même qu’il n’existe à la base qu’une seule requête.

Afin de faciliter la procédure et la célérité du traitement de l’affaire par le juge administratif, il peut aussi être tentant d’utiliser la voie du référé-liberté prévu à l’article L. 521-2 du Code de justice administrative qui présente la particularité de ne nécessiter qu’une seule requête, sans demande au fond, et d’être jugé sous quarante -huit heures. Il existe toutefois un obstacle insurmontable à l’utilisation de cette voie. En effet, le Conseil d’Etat considère que la pratique sportive ne constitue pas une liberté fondamentale. Par ailleurs, le principe d’égalité des usagers devant le service public qui constitue le fondement de ce type de requête en matière d’installation sportive ne constitue par lui-même une liberté fondamentale. Cette position a semble-t-il été adopté afin d’éviter la multiplication des recours, le principe d’égalité pouvant se décliner sous de nombreuse formes.


Dans les espèces étudiées, il parait évident que le recours au fond n’est qu’un prétexte car ce qui intéresse avant tout les clubs, c’est de pouvoir commencer ou poursuivre leur saison sportive. Le fait d’obtenir gain de cause sur le fond deux ans après les faits, ne présente pour elles guère d’intérêt, si ce n’est pédagogique pour les nouvelles répartitions de créneaux horaires. L’utilisation de la voie de la tierce opposition dans une affaire constitue aussi une innovation de procédure destinée à intervenir afin de maintenir une position acquise. En effet, à la suite d’un changement de municipalité une association qui avait attaqué un refus de mise à disposition, s’est retrouvé en situation de défendre la position qu’elle avait retrouvée sous la nouvelle municipalité. Mais comme toute les affaires de référé suspension, le juge administratif doit d’abord vérifier que les conditions pour accorder la suspension de la mesure sont réunies c'est-à-dire qu’il existe une urgence objective en matière sportive et un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision.



I) Les conditions de l’urgence sportive

Pour le Conseil d’Etat, il appartient au juge des référés d’apprécier in concreto l’urgence de la situation. Or cette position conduit le juge administratif à se placer dans une situation d’appréciation concrète de l’urgence sportive c'est-à-dire que le juge doit vérifier, à l’aulne d’éléments purement sportifs (durée de la saison sportive, importance des effectifs, existence ou non de compétition, …) la réalité de l’urgence. Dans ce type d’affaire, l’urgence, sauf exception dépend d’abord d’éléments sportifs et non de l’intérêt public local. Sauf à considérer que le club requérant est le seul porteur de l’intérêt local ce qui paraît quelque peu théorique. Ainsi donc l’urgence sportive vient –elle heurter de front l’intérêt public local. Mais avant de se prononcer quant à l’existence d’une situation d’urgence, le juge devra d’abord vérifier que la décision contestée n’a pas été exécutée.

A) La décision contestée ne doit pas avoir été exécutée

En matière sportive ; une des difficultés réside précisément dans la question de savoir si la décision est ou non intégralement exécutée. Dans les affaires analysées, il apparaît de manière évidente que tout recours en suspension demandant la mise à disposition d’une salle n’est concevable qu’en début de saison. Il sera toujours possible de considérer de manière très théorique que la décision ne sera intégralement exécutée qu’à la fin de la saison sportive (qui se situe généralement au mois de mai ou juin). Mais il paraît très audacieux d’intenter un recours après le premier trimestre de l’année sportive c'est-à-dire au-delà du mois de décembre au moins quand il s’agit d’entraînement. Dans ce type d’affaire, plus que l’idée de « décision complètement exécutée » ce qui semble prévaloir c’est une appréciation globale en termes d’ordre de grandeur. A quoi bon ordonner une mesure de suspension un moins avant la fin de la saison sportive ? Certes la décision ne sera pas totalement exécutée mais l’urgence apparaîtra alors bien moindre.

Il paraît donc très difficile d’arguer de l’urgence dans la mesure où la saison sportive est bien entamée. De surcroit, il n’est pas impossible de penser que le club aura pu trouver une solution de rechange dans une autre commune ou dans une autre installation de la commune ce qui, de facto, entraînera la disparation de la situation d’urgence.

La question est un peu différente pour les compétitions car le club a très bien pu poursuivre ses entraînement dans d’autres locaux et n’avoir besoin des installations municipales que de manière ponctuelle. C’est ce qui s’est passé dans l’affaire Blagnac Constellation Gym où le recours n’a été enregistré que le 7 novembre 2007 pour des créneaux horaires du mois de décembre de la même année car il s’agissait de compétitions et non d’entraînement. La décision n’avait pas commencée à être exécutée. Il faut donc aussi considérer que si l’on se situe trop en amont de l’affaire c'est-à-dire dés la notification, date à laquelle la décision n’est pas exécutée, l’urgence n’est pas forcément encore constituée….

B) La caractérisation de l’urgence sportive

Dans la première affaire Olympique Cabriès-Calas les activités mises en place faisaient appel pour leur encadrement à des personnes rémunérées et diplômés comme le prévoit l’article L. 212-1 du Code du sport. A ce titre, ces personnes doivent être contactées pendant l’été afin de s’assurer de leur disponibilité. Le juge dans son ordonnance fait état de « la nécessité d’un engagement auprès des éducateurs salariés assurant l’encadrement des disciplines correspondantes »

Par ailleurs, en raison de la nouvelle répartition des créneaux horaires imposées par la commune de Cabriès, l’O.C.C. a du suspendre momentanément les adhésions pour la section « Arts martiaux ». L’urgence existait donc à ce second titre car le magistrat note que l’association « justifie d’une urgence tenant à permettre l’inscription aux activités associatives de sa section Arts martiaux ».

Le caractère urgent a aussi été reconnu car la convention du 12 mars 2006 faisait clairement état de privilégier un règlement amiable du différent avant de saisir le juge. Cette disposition et le blocage constaté du côté des services municipaux explique la requête n’ait été déposée que le 5 novembre 2007. Si l’année sportive était déjà commencée, elle était loin d’être terminée.

Par contre dans la deuxième ordonnance rendue dans la même affaire le 29 janvier 2008, le juge a estimé que la condition d’urgence n’était pas remplie. En effet, à la suite de la première décision du 16 novembre 2007 le maire de la commune avait pris une nouvelle décision le 26 novembre 2007 qui était à peine moins défavorable pour la requérante. Mais cette dernière avait attendu le 25 janvier 2008 avant d’introduire une nouvelle requête. Avec une rare célérité le juge a rendu une ordonnance de rejet au motif de « l’absence de diligence de l’association… ».

Cette deuxième ordonnance vient rappeler que les décisions de l’administration sont exécutoires, ce qui permet donc à un maire de reprendre une nouvelle décision dans la foulée de la décision suspendue à la condition bien sur qu’il ne s’agisse pas exactement de la même décision. Ce qui fut le cas dans l’affaire de Cabriès.

Le club qui obtient une décision de suspension n’est donc pas forcément au bout de ses peines car il lui faudra réintroduire une nouvelle requête au fond et en référé contre la nouvelle décision. C’est dans une telle situation que l’on mesure le caractère assez artificiel de la requête au fond. S’il appartient à l'administration de prendre, sans qu'elle ait à y être invitée par le bénéficiaire de ce jugement, les mesures que son exécution appelle nécessairement. Il est aussi possible que la commune (pour des raisons diverses) ne souhaite pas exécuter la décision. Afin de faire face à ce type de résistance, il existe un ensemble de procédures spécifiques de suivi des décisions juridictionnelles prévue par les articles L 911-1 à 10 du Code de justice administrative. Ces dispositions prévoient la possibilité de prononcer des injonctions et des astreintes et éventuellement la liquidation de celles-ci au profit du requérant qui pâtit de la non application d’une décision juridictionnelle.

D’une manière générale, si l’administration reprend une procédure antérieurement déclarée irrégulière par la juridiction administrative, mais en en corrigeant les irrégularités dont la première était entachée, l'administration ne méconnaît pas la chose jugée et n'entache pas sa décision d'un détournement de procédure.

Dans une telle situation, il appartiendra alors au club sportif non satisfait de saisir à nouveau la juridiction administrative mais la saison sportive sera sérieusement entamée pour ne pas dire terminée, et l’urgence aura disparue!

Dans l’affaire juge par le Tribunal administratif de Toulouse, le 15 décembre 2007, il était tentant pour la commune défenderesse d’arguer de l’absence d’urgence en raison du caractère tardif de la requête. Pourtant le juge n’a pas suivi cette voie car si la décision implicite de rejet datait du mois de juin 2007, la décision expresse de rejet n’a été adressée que le 29 octobre 2007. Le magistrat ne manque pas de relever que : « la convention passée par la commune avec l'autre club de gymnastique y pratiquant les activités en cause et portant sur l'occupation du Gymnase spécialisé NAUDIN et du Gymnase des Prés n'a été signée que le 7 août 2007, pour une saison d'activités gymnique dont la pratique a repris en septembre 2007 avec le démarrage des compétitions à partir du mois de décembre 2007 ; que, dans ces conditions, la demande présentée par l'association requérante présente un caractère d'urgence qui ne peut être regardé comme résultant des conditions dans lesquelles elle a présenté sa demande à la commune de Blagnac ».

Dans cette affaire donc le caractère d’urgence peut encore apparaître assez tardivement dans l’année sportive car il résulte non pas des dates d’entraînements mais des dates de compétition. Mais il convient pour le requérant de ne pas perdre de vue l’idée qu’il existe une « fenêtre de tir » pendant laquelle l’urgence pourra être reconnue.





II) Le moyen propre à créer un doute sérieux

Cette notion qui a remplacé celle de « moyen sérieux » sous l’empire de l’ancien sursis à exécution vise en fait, à assouplir les conditions d’octroi de la suspension des décisions administratives car dans le passé, le nombre de sursis à exécution accordés était très faible.

L’idée qui sous tend la réforme du 30 juin 2000 est que « le juge administratif peut suspendre l’exécution d’une décision administrative sans avoir de certitude sur le caractère fondé des moyens d’annulation ».

En fait, l’appréciation est pour une bonne part subjective comme le reconnaît le commissaire du gouvernement Laurent Vallée, le « doute sérieux suppose un sentiment, une appréciation d’ordre subjectif » dans l’affaire « Communauté d’agglomération de Saint-Etienne Métropole » jugée en 2002 qui a posé les principes d’examen de la notion. Le juge des référés doit donc préciser le moyen parmi l’ensemble de ceux soulevés par le requérant qui lui permet de considérer qu’il existe un doute sérieux.
Ainsi, le doute sérieux existe quand au niveau de l’instruction, il apparaît une contradiction apparente entre deux textes. Dans les affaires examinées ici, le doute sérieux reposait sur le non respect d’une convention mais aussi le non respect du principe d’égalité d’accès au service public.


A) Le non respect d’une convention

Comme il s’agit d’occuper le domaine public communal, les communes élaborent la plupart des cas des conventions d’occupation à titre gratuit avec chaque association sportive. C’était le cas dans la première affaire de l’Olympique Cabriès-Calas.

En l’espèce la convention triennale signée le 12 mars 2006 prévoyait la mise à disposition du club des installations sportive municipales en tant que de besoin et sous réserve des contraintes municipales, pour y permettre la pratique des différentes disciplines sportives. La convention précisait notamment « les plannings d’utilisation des installations sportives sont établis chaque année par le service municipal des sports, après consultation des acteurs du sport de la commune. Y sont précisées, les périodes, jours et heures ».

Il apparaît donc que la convention signée ne faisait que rappeler des principes mais que la répartition effective n’avait lieu qu’au tout début de l’année sportive après consultation des différents acteurs sportifs de la commune lors d’une réunion que se tient avant le début de la saison sportive. L’article 11.2 de la convention précisait dans son quatrième alinéa :
«  Ces plages horaires sont susceptibles, lorsque l’intérêt municipal l’exige, d’être modifiées unilatéralement par la commune, qui veille à ce que la section concernée ne soit pas pénalisée en conséquence ».

Le premier moyen d’annulation tenait dans le non respect des dispositions de la convention car alors même que le 17 juillet 2007, la commune venait d’avoir connaissance d’une autre association créée onze jours plus tôt, la décision de lui attribuer des créneaux horaires avait été prise et ce, sans aucune concertation.
Pour le juge, le non respect de la convention apparaît comme un des deux moyens retenus :
« Considérant qu’en l’état de l’instruction, les moyens tirés du non respect de la convention du 12 mars 2006 et du non respect du principe d’égalité de traitement sont propres à créer une doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige…. »


2) Le non respect du principe d’égalité de traitement

Le non respect de ce principe constitue en fait le moyen qui peut être invoqué le plus fréquemment tant il est malléable. Ceci tient aussi au fait que toutes les communes ne concluent pas forcément avec les clubs utilisateurs des conventions mais plutôt attribuent des heures en fonction d’un planning établi en début d’année sportive. Les deux pratiques se sont d’ailleurs pas exclusives l’une de l’autre.

L’utilisation du domaine public des collectivités territoriales est régie notamment par le Code général de la propriété des personnes publiques et les règles d’occupation sont précisées aux articles 2122-1 à 2122-4 du même code. Ces principes maintenant codifiés reposent sur l’idée que d’une manière générale l’utilisation du domaine public par une personne privée revêt un caractère exceptionnel ce qui justifie (à quelques rares exceptions) un régime juridique assez précaire pour l’utilisateur.

Dans une affaire de refus (jugée au fond) de mise à disposition d’une salle municipale des fêtes en faveur d’un club sportif la Cour administrative d’appel de Douaia opportunément rappeler que : « la mise à disposition d'une salle communale à des associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande, peut être refusée pour des motifs tirés des nécessités de l'administration des propriétés communales ou par celles du maintien de l'ordre public, ce refus ne peut être légalement prononcé qu'en respectant l'égalité entre les différents usagers du domaine communal »

Dans cette affaire, l’argument avancé par la commune pour refuser la demande de mise à disposition de la salle reposait sur l’antériorité des autres demandes effectuées, or la Cour rappelle que l’association requérante «  implantée localement depuis plusieurs années n'avait pas été destinataire, contrairement aux autres associations, de la lettre en date du 12 juin 2001 par laquelle la commune invitait ces dernières à transmettre leurs demandes en vue de l'occupation de la salle polyvalente ; que ce critère d'antériorité ne pouvait dès lors être opposé à l'association ».

Dans une autre affaire, une Cour administrative d’appel a estimé qu’une commune ne peut réserver les installations municipales aux seules associations subventionnées.

Dans la première affaire de Cabriès, la diminution de moitié du nombre de créneaux horaires offert par la commune de Cabriès ne reposait sur aucune cause sérieuse et il est apparu lors des débats que l’ Ecole d’Arts Martiaux de Cabriès nouvel attributaire des créneaux horaires venait d’être créée et de surcroît s’était déjà vu attribuée une subvention de 7500 euros …
C’est certainement ce qui explique que la requête de cette association ait été rejetée quand elle a intenté un recours à la suite du changement de municipalité. La juge estimant qu’il n’existait pas de doute sérieux.


La rupture du principe d’égalité a aussi été soulevée avec succès devant le Tribunal administratif de Toulouse qui considère que « le moyen invoqué par l'association requérante et tiré de ce que la décision de rejet de sa demande, portant sur un volume maximum au demeurant limité de 12 heures hebdomadaires, la prive du bénéfice de tout créneau horaire, durant la saison 2007/2008, sur les 8 gymnases et la salle polyvalente dont dispose la commune de Blagnac est contraire au principe d'égalité entre les usagers ; que ce moyen doit être regardé comme étant propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ». 

Il convient de signaler ici aussi que ce qui a certainement décidé le magistrat à accorder la suspension, c’est le fait que l’association était privée de tout créneau horaire.
Le juge a d’ailleurs prononcé une injonction non assortie d’astreinte afin d’attribuer des créneaux à hauteur de six heures par semaine soit la moitié de ce qui était attribué auparavant. Par contre, saisir le juge des référés pour contester l’attribution de quelques créneaux épars paraît voué à l’échec.

Le refus d’attribution de créneau ne reposait pas sur des considérations dénués de bon sens, mais sur le fait qu’il existait dans la commune deux associations pratiquant la gymnastique et que pour des raisons de politique sportive municipale, il était nécessaire qu’elles se rapprochent, voire qu’elles fusionnent.

Pour des raisons facilement compréhensibles, les communes cherchent à rassembler les clubs voire à les fusionner afin d’avoir moins d’interlocuteurs et d’effectuer des économies d’échelle, c’est dans cette logique que s’inscrivait la commune de Blagnac. Toutefois, ce qui est bon en termes de management de politique sportive municipale ne l’est pas forcément en termes de droit associatif. La liberté d’association constitue une liberté fondamentale garantie non seulement par le Conseil Constitutionnel mais aussi par la Cour européenne des droits de l’homme notamment, quant au droit de ne pas adhérer à une association.

Ainsi, les communes peuvent-elles inciter aux regroupements d’associations mais en aucun cas elles ne sauraient contraindre par la coercition que représente la menace de privation des créneaux horaires dans les équipements sportifs municipaux. Il est vrai qu’il existe un moyen moins voyant de contrainte mais tout aussi efficace c’est l’attribution de subvention. Mais dans la mesure où il s’agit de subventions incitatives, la liberté d’association n’est pas atteinte. Simplement, la liberté d’association dans ce cas a un prix : la perte d’une subvention plus importante. Il peut aussi arriver que l’arme de la subvention soit aussi utilisée de manière plus coercitive c'est-à-dire en supprimant purement et simplement les aides financières accordées. Une telle position est difficilement tenable pour une commune dans la mesure où elle devra justifier la différence de traitement d’une année sur l’autre par des éléments objectifs. Et il n’est pas impossible que l’arme du référé-suspension soit de nouveau utilisée !
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